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« Notre objectif est de faire du tourisme une filière de développement économique, créatrice de richesses et d’emplois ! »

Quels sont les principaux atouts de la Géorgie sur le plan économique ? Plus généralement, l’accroissement des relations entre la Géorgie et l’Union Européenne est-il l’un des axes majeurs privilégiés par votre Gouvernement pour renforcer le rayonnement de son économie ?

Les transformations économiques et de gouvernance menées par les Gouvernements successifs durant la décennie passée commencent à produire des résultats tangibles. La croissance est stable et se situe à 3-4% ces dernières années et les investissements étrangers, majoritairement tournés vers les secteurs des transports et des communications, de la construction et de l’énergie, sont en hausse permanente.
Leur dynamisme est dû à l’attractivité économique renforcée pour les investisseurs, notamment grâce à une fiscalité basse et simple, un système douanier efficace, une série d’accords de libre-échange donnant accès à presque 900 millions de consommateurs, un secteur bancaire stable et, surtout – nous en sommes très fiers – une administration plutôt transparente et non-corrompue, soit un cas rare dans l’espace post-soviétique…

L’Union européenne est déjà le premier partenaire commercial de la Géorgie, assurant 32,6 % de ses échanges. L’accord d’association entre l’UE et la Géorgie prévoyant une zone de libre-échange approfondie et complète, pleinement entré en vigueur le 1er juillet 2016, renforcera encore plus les liens économiques entre nos deux entités, stimulera la croissance et favorisera la modernisation du pays.

Parmi les différents dossiers prioritaires, votre pays souhaite mettre en avant la place et le rôle du tourisme… Quelle est votre stratégie en la matière ? Quels sont vos objectifs et comment imposer la Géorgie en tant que nouvelle destination ?

La Géorgie, une civilisation ancienne au croisement de l’Asie et l’Europe a tous les atouts pour développer le tourisme. Son superbe patrimoine architectural et artistique, ses vieilles églises (le christianisme est la religion officielle à partir du début IVème siècle), sa tradition de la viticulture remontant à 8000 ans, sa nature et sa cuisine, l’hospitalité de ses habitants et ses sublimes paysages de montagne ravissent  à la fois les voyageurs curieux et avides de découverte, ainsi que les randonneurs, les amateurs d’équitation, de ski, de rafting ou de parapente… L’année dernière, nous avons accueilli plus de 6 millions de touristes ! Pour un pays de seulement 3,7 millions habitants, c’est un résultat plutôt flatteur. Notre objectif est de faire du tourisme une filière de croissance économique créatrice de richesses et d’emplois, d’où l’accent mis sur le développement du tourisme de montagne. D’ailleurs, avec l’aide de l’École Nationale de Ski et d’Alpinisme (ENSA) de Chamonix, nous venons de créer en Géorgie une École des guides de montagne qui doit pallier au manque des professionnels du tourisme de montagne en Géorgie.

Dans le domaine culturel, une étape a été franchie dans les relations franco-géorgiennes avec, notamment, la signature d’une Convention de partenariat entre les deux Centres Nationaux du Livre. Quels sont les enjeux et les perspectives de cette Convention ?

Effectivement, l’année dernière, les CNL géorgien et français ont signé une Convention de partenariat relative à la publication, la traduction et la démocratisation de la lecture, ce qui a été une concrétisation du souhait de renforcer la coopération culturelle franco-géorgienne dans le domaine du livre. La Convention prévoit la multiplication des échanges entre les représentants du secteur du livre géorgien et français, d’autant plus que la France et la Géorgie sont les invitées d’honneur de la Foire de Francfort pour les années 2017-2018.

La Géorgie vient d’acquérir le château et le domaine de Leuville, berceau historique de son Gouvernement. Que cela représente-t-il à vos yeux et quelle sera la vocation de ce lieu ?

Ce château et ce domaine ont une importance symbolique pour les Géorgiens. Ce lieu incarnait pendant toute la période de l’occupation soviétique la Géorgie libre et indépendante. Pendant la Première République (1918-1921), la Géorgie est parvenue à demeurer libre et unifiée jusqu’à l’invasion du pays par l’Armée Rouge en février 1921.
Dans cette période bouleversée par les événements de la première guerre mondiale et ses répercussions géopolitiques, la République Démocratique de Géorgie institua, par la force du suffrage universel, au travers d’une Constitution, de son Gouvernement et de son Président, des principes démocratiques et des mesures sociales et légales parmi les plus avancées pour l’époque.
Refusant la capitulation devant cette invasion, le Président Noé Jordania et ses ministres, dûment mandatés par le Parlement, sont partis en exil pour continuer, de l’étranger, à défendre la cause de l’indépendance et de la souveraineté du Pays.
Réfugiés en France, les membres du Gouvernement de la République démocratique de Géorgie ont décidé d’acquérir aux moyens de fonds revenant à la Géorgie, cette propriété immobilière destinée à s’y établir pour y résider durant leur exil. En 1953, les derniers membres vivants de l’ancien Gouvernement de la République Démocratique de Géorgie ont rédigé un testament moral intitulé « Conditions pour que le Domaine de Leuville soit remis à son véritable propriétaire, la Géorgie indépendante ».
C’est cette volonté qui a été concrétisée par la signature le 23 septembre 2016 de l’acte de donation du Château et du domaine à notre pays. Notre Gouvernement envisage d’y aménager un centre historique et culturel franco-géorgien, une académie géorgienne qui, outre la promotion de notre culture en France, favorisera les échanges bilatéraux en y créant les meilleures conditions de travail pour des artistes, écrivains, chercheurs et historiens. Nous voulons que ce lieu, hautement symbolique, devienne un nouveau pont solide de l’amitié entre nos deux pays.

Quel message, enfin, souhaiteriez-vous adresser à la classe politique française par l’intermédiaire du Journal du Parlement ?

ILa France a toujours soutenu la jeune République géorgienne issue des ruines de l’Union Soviétique. Vous étiez à nos côtés aux moments les plus difficiles. Vous nous avez accompagnés dans le processus douloureux de la transformation de notre société. Le résultat est là : aujourd’hui, la Géorgie est une démocratie pluraliste, avec des institutions viables et avec une économie en pleine croissance.
Je voudrais assurer nos amis français qu’ils peuvent toujours compter sur notre amitié et que la Géorgie restera un partenaire fiable, responsable et digne de confiance.

Propos recueillis par
Olivier de Tilière

S.E. Écateriné Siradzé-Delaunay

Ambassadeur de la Géorgie en France et à Monaco,
Représentante permanente de la Géorgie à l’Unesco