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Droits des femmes en Azerbaïdjan : du suffrage universel au changement sociétal

Il y a cent ans, les femmes azerbaïdjanaises devenaient électrices et éligibles comme les hommes. Alors que les mouvements suffragistes battent leur plein aux États-Unis, au Royaume-Uni ou encore, en Allemagne, la République d’Azerbaïdjan, fraîchement indépendante, accorde, en effet, ce droit fondamental de vote et d’éligibilité aux femmes en 1918, adopté par le Parlement le 21 juillet 1919. Elle rejoint ainsi le peloton de tête en la matière, en devançant bien des pays occidentaux, dont la France et en démontrant qu’elle n’est pas en reste des processus politiques mondiaux. Un exploit d’autant plus méritoire, car, l’Azerbaïdjan est le premier pays de l’Orient musulman à introduire le suffrage universel.

En seulement 23 mois d’existence (1918-1920) et au-delà du droit de vote, la République d’Azerbaïdjan a jeté les bases d’un certain nombre d’Institutions et d’instruments juridiques pour la protection des droits et l’autonomie des femmes : l’instauration d’un congé maternité de 10 semaines, l’ouverture d’écoles maternelles, la création des centres de formation pour les professeures des écoles, etc. La loi de 1919 sur la création de l’Université d’État de Bakou, instaure le principe de non-discrimination dans les admissions d’étudiants, mais aussi dans l’embauche du personnel (enseignants et employés administratifs). Ainsi, le nombre des femmes actives dans les années 1918-1920 avait augmenté de manière conséquente, égalant presque celui des hommes. Les avancées sont impressionnantes dans l’éducation. Par exemple, si le Gymnasium de la ville de Ganja comptait 4 filles en 1918-1919, leur nombre s’élève à 296 en 1919-1920.

En 1920, à la suite de l’invasion de l’Armée rouge, cette première République a été renversée et un nouveau système économique et politique a été instauré. En dépit de quelques difficultés au cours de l’ère soviétique, la femme azerbaïdjanaise a exprimé avec confiance son activité propre dans tous les domaines de la vie. La définition des principes de base de la politique des femmes dans le pays et son élévation au rang de la priorité nationale sont liées au nom de l’éminente figure politique de l’Azerbaïdjan, Heydar Aliyev (1923-2003), qui a accompli un travail important pour l’institutionnalisation du mouvement féminin à l’époque soviétique et pendant l’indépendance, avec une attention particulière accordée à la promotion des femmes aux postes de décision.

Depuis la restauration de son indépendance en 1991, l’Azerbaïdjan a obtenu de nombreuses avancées en matière des droits des femmes. En 1998, le Comité d’État pour les Droits des Femmes de la République d’Azerbaïdjan a été créé. L’Azerbaïdjan était, à l’époque, le seul pays de la CEI à disposer d’une telle division dans l’Administration publique centrale. Au fil du temps, les pouvoirs du Comité ont été élargis et, en 2006, le Comité d’État pour la Famille, les Droits des Femmes et de l’Enfant a été créé par le décret du Président Ilham Aliyev. Après son adhésion à l’ONU et à l’OSCE en 1992 et au Conseil de l’Europe en 2001, l’Azerbaïdjan a commencé a collaborer étroitement avec les structures et programmes de ces organisations, en charge des questions de genre et de la condition féminine. De nombreuses lois ont été promulguées et des initiatives ont mises en place dans le domaine de l’égalité hommes-femmes.

Selon les statistiques, aujourd’hui, 30% des femmes travaillent dans le secteur public et 70% dans le secteur privé. Certains organismes publics organisent des concours d’admission destinés uniquement aux femmes afin de favoriser leur représentativité dans tel ou tel secteur. Un tel concours a été introduit, par exemple, dans le Comité des Douanes, ce qui a permis d’augmenter le pourcentage des femmes travaillant dans ce secteur à 20%.

En matière politique, les avancées sont importantes : le pourcentage des femmes dans les Conseils municipaux est passé de 1,7% en 2005 à 35% en 2016, ce qui constitue la plus forte progression (33,3%) en Europe pour cette période. Pour la même période, le pourcentage des femmes juges dans les Cours constitutionnelles est passé de 11,1% à 22,2% et le pourcentage d’élues au Parlement de 2,2% à 15,6%.

• L’entrepreneuriat féminin et l’éducation pour l’autonomisation des femmes et le développement économique.

L’Azerbaïdjan a pris d’importants engagements dans le cadre de son programme de développement socio-économique, intitulé « Feuille de route stratégique » et de la mise en œuvre des Objectifs de développement durable (ODD) des Nations Unies. Les réformes récentes, dont les mesures prises pour améliorer le climat des affaires et en faveur de l’entrepreneuriat, ainsi que le développement socio-économique des régions ont créé de nouvelles opportunités et suscité un grand enthousiasme chez les entrepreneurs, en particulier chez les femmes. Ces dernières années, le nombre d’entreprises appartenant à des femmes a augmenté significativement et s’élève actuellement à environ 180 000. Aujourd’hui, les femmes représentent 30% des entrepreneurs, contre 4% il y a seulement quelques années. L’information sur l’accès aux financements, la formation professionnelle, la formation à l’entrepreneuriat sont au coeur de nos préoccupations pour développer davantage l’entrepreneuriat féminin. L’accent est mis, notamment, sur les régions et les zones rurales. Pour y parvenir, l’Azerbaïdjan participe activement aux programmes d’Institutions internationales, comme le Programme spécial des Nations Unies pour les économies de l’Asie centrale (SPECA), dont il préside également le Groupe de travail thématique sur “le Genre” et “l’Économie”.

L’élimination des stéréotypes sexistes constitue actuellement l’une des questions d’actualité.

Aujourd’hui, il n’y a plus de métiers interdits aux femmes. Les fondatrices de la startup Rainergy, Zahra Gasimzade et Reyhan Jamalova, âgées seulement de 16 ans et qui fait partie du classement Forbes 30 Under 30 pour l’Asie et de la liste des 100 femmes les plus inspirantes en 2018 selon le BBC 100 Women, en sont une parfaite illustration.

Des résultats notoires ont été obtenus dans le domaine académique : en 2017, le nombre de filles ayant obtenu un diplôme de Licence a dépassé celui des garçons et la proportion de filles dans les admissions en Master était de 56,4%. Selon le Rapport de l’UNESCO de 2013, l’Azerbaïdjan figure parmi les pays où le pourcentage des femmes parmi les chercheurs est le plus élevé.

Aujourd’hui, les femmes indépendantes d’Azerbaïdjan sont partout représentées et jouent un rôle important. Je tiens tout particulièrement à souligner le rôle de la première Vice-présidente de la République d’Azerbaïdjan Madame Mehriban Aliyeva qui, grâce à ses activités couvrant un large éventail de problématiques, comme la santé, la culture, la société ou encore, l’environnement, est devenue une source d’inspiration pour nombre de femmes et a amplifié l’intérêt des Azerbaïdjanaises pour une participation active à la vie socio-politique.

Professeur Hijran Huseynova

Présidente du Comité d’État pour
la Famille, les Droits des Femmes et de
l’Enfant de la République d’Azerbaïdjan
Docteure en Sciences politiques