Nous devons changer d’ère. À l’heure des « villes-monde », il est nécessaire d’aborder la gouvernance de la capitale avec un nouvel état d’esprit. Dans la compétition internationale que se mènent ces « villes où la vie va plus vite », l’attractivité parisienne ne se joue plus dans les 105 km2 de sa commune, mais bien à l’échelle de l’aire métropolitaine. Paris ne peut plus se penser à l’intérieur de son périphérique…

Aujourd’hui, les réponses aux problématiques de lutte contre le réchauffement climatique, de logement ou de mobilité doivent se concevoir davantage avec la métropole et la Région pour imaginer des solutions efficaces. Cet état d’esprit exige d’apprendre à mieux travailler ensemble. Un état d’esprit qui demande parfois de penser contre soi-même. Ne pas se dire que l’on a raison tout le temps contre tout le monde. Il faut que chacun réalise que l’on ne peut réussir ce défi de « la ville-monde » que collectivement. Le rôle d’un maire manager se joue précisément dans la capacité à créer des synergies et des convergences d’intérêts entre une multitude d’acteurs différents. Il ne s’agit pas de se limiter à un discours sans en présenter la méthode. La crise du logement est révélatrice de l’enjeu en termes de méthode de gouvernance.

D’un côté, à Paris, des prix qui ont doublé en dix ans, un système de production de logements sociaux par conventionnement très coûteux sans créer de nouveaux logements et une réserve foncière intra-muros qui s’épuise; de l’autre, en banlieue, un besoin de solidarité territoriale, de rénovation urbaine, esthétique, énergétique et écologique. Il faut aujourd’hui imaginer un système gagnant-gagnant de production de nouveaux logements. Par exemple, à travers la participation financière de Paris à la co-construction d’un habitat social exemplaire en dehors de son périmètre intramuros, en contrepartie du traitement mutualisé d’une partie des demandes de logements sociaux. Nous avons besoin d’expérimenter cette solution innovante sur la base de conventions entre Établissements publics territoriaux de la métropole.

À l’aune de la situation financière de la ville de Paris, un maire manager doit devenir davantage comptable de l’argent public. En effet, l’endettement, qui aura doublé en une mandature, pour atteindre 8 milliards d’euros en 2020 et l’augmentation constante des dépenses qui augmentent plus vite que les recettes, imposent de passer à un autre mode de gestion. Cela implique, d’une part, de définir une stratégie budgétaire claire et pluri-annuelle et, d’autre part, de renforcer son implication dans la gestion, le suivi et le contrôle au quotidien des dossiers structurants. La dégradation du service de la propreté, les catastrophes industrielles de Vélib’ et Autolib’ illustrent, entre autres, le déficit de management de l’exécutif municipal sortant.

Le rôle d’un maire manager réside également dans l’ambition de mettre la qualité et l’efficacité du service rendu aux citoyens au cœur de l’action publique. Il s’agit de transformer l’administration parisienne en « maison des services », en l’adaptant aux nouveaux besoins et aux nouveaux rythmes de vie des Parisiennes et des Parisiens.  Ainsi, à titre d’exemple, il est temps d’accélérer la généralisation de l’ouverture des bibliothèques en soirée et le dimanche dans la capitale pour répondre aux demandes des familles et des étudiants. Tandis que l’amplitude horaire d’ouverture des bibliothèques est d’une durée moyenne de 65 heures à Stockholm, 78 heures à Londres, 88 heures à New-York, elle est seulement à Paris de 38 heures hebdomadaires…

Le rôle d’un maire manager doit, enfin, s’inscrire dans une modernisation des outils démocratiques de gouvernance. C’est-à-dire, ne plus concevoir la prise de décision de manière strictement verticale. Dans l’exercice de proximité que constitue le travail d’une équipe municipale, il est devenu nécessaire de proposer un processus beaucoup plus linéaire, constant et durable de la vie démocratique locale. À ce titre, les comptes rendus de mandat réguliers institués par Bertrand Delanoë, en prise directe avec les habitants dans chaque arrondissement, ont représenté une certaine modernité qu’il convient de retrouver depuis qu’ils ont été abandonnés par l’actuelle maire de Paris.

La meilleure prise en compte de l’avis des citoyens sur des projets de nature exceptionnelle constitue un progrès démocratique vers lequel Paris doit s’engager. C’est là un moyen utile de trancher des dossiers sensibles et d’assurer sereinement leur pérennité. Ainsi, je souhaite, par exemple, que le principe d’une votation citoyenne soit mis en œuvre sur chaque projet impliquant la construction d’Immeubles de Grande Hauteur (IGH). La décentralisation des pouvoirs vers les maires d’arrondissement sur des compétences de proximité représente un mode de gouvernance moderne et efficace pour améliorer la vie quotidienne des Parisiens. C’est notamment le cas de la politique de la propreté où, avec les moyens adaptés, l’échelon le plus local s’avère sans doute le plus pertinent pour agir au plus près du terrain.

Je crois à la philosophie du contrat démocratique et de l’approche partenariale pour renouveler la gouvernance de Paris. Un mandat doit se concevoir comme un « cahier des charges » vis-à-vis des citoyens, sur lequel des points d’étapes sont nécessaires tout au long d’un mandat. C’est pourquoi je propose de véritables contrats d’objectifs avec chaque arrondissement, élaboré avec la participation du monde associatif et renouvelé chaque année. Cette approche, inédite et innovante, a vocation à rassembler des femmes et des hommes de bonne volonté, donnant toute sa place à la société civile. Ainsi, les Parisiennes et les Parisiens pourront s’approprier une nouvelle dynamique de progrès dans leur ville.

Pierre-Yves Bournazel

Député de Paris
Vice-président de la Commission
des Affaires culturelles et de l’Éducation
Co-Président du Groupe d’Études
sur l’Économie du sport