Par Terence Brown, Directeur général de la Banque Européenne d’Investissement (BEI).
Je voudrais insister particulièrement sur la contribution de la BEI dans le bon déroulement de l’exécution des politiques externes de l’UE, des conditions préalables d’accession, mais aussi sur le rôle et le développement de l’activité spécifique de la banque au cours de ces dernières années, en particulier pour les pays d’Europe Centrale et du Sud, candidats et potentiellement candidats.
Il est peut-être utile de rappeler brièvement les événements cruciaux de ces dernières années : en 1997, il a été décidé de l’élargissement aux dix pays candidats d’Europe centrale et orientale, ainsi qu’à Chypre et Malte, afin de focaliser l’aide en conséquence.
Le processus d’élargissement a abouti en 2004 à l’accession de 10 nouveaux États membres et la banque a contribué à leur intégration harmonieuse dans l’UE par le financement d’opérations majeures, telles que des projets pour le développement des réseaux et des voies de communication, l’environnement, les infrastructures municipales, et les activités industrielles comprenant l’appui aux PME. Les volumes de prêts de la BEI dans ces pays, sous un mandat spécifique de pré-accession, ont atteint 3,8 milliards d’euros en 2004, soit 9% des prêts totaux de la BEI, ce qui est beaucoup plus que les années passées.
La même année, les prêts dans les pays en accession (Bulgarie, Roumanie) se sont élevés à 120 millions d’euros, tandis que dans les Balkans, y compris en Croatie, la BEI a contribué à des projets de développement pour un montant de 460 millions d’euros. Au premier rang du processus d’agrandissement se trouvent la Roumanie et la Bulgarie. Les deux pays ont jusqu’au 1er janvier 2007 pour appliquer les négociations des « acquis communautaires ».
Pour les pays des Balkans, il a été décidé que l’appui économique et social devrait être fourni de façon coordonnée au niveau régional. Sous le procédé de stabilisation, la BEI, en coopération avec la PIFI, a complété le rôle de la Commission européenne en matière d’aide et de reconstruction.
Le sommet de Thessalonique, en décembre 2002, a apporté la perspective d’une intégration croissante en Europe, incluant également des investissements dans les Balkans. Depuis lors, pour stimuler le niveau de cohésion économique et sociale, l’aide est accordée aux pays dont les besoins sont les plus pressants, qui ne sont pas dans l’UE mais géographiquement situés entre plusieurs pays membres et dans une perspective d’intégration à terme.
En dépit des accomplissements effectués jusqu’ici, il reste des défis considérables à relever et des efforts majeurs sont exigés de la part des gouvernements pour faciliter une intégration sans heurts. Les progrès, en particulier, devront être réalisés dans plusieurs domaines.
- L’accélération des réformes (certaines sont habituellement appliquées à la phase initiale) : des privatisations, y compris de petite taille, commerciales et étrangères. D’autres sont plus difficiles à réaliser, comme la politique de concurrence, la réforme du secteur bancaire, et le développement des marchés des valeurs à court ou moyen terme.
- Le renforcement de l’« épine dorsale » du système économique : l’infrastructure de mauvaise qualité est une des plus grandes entraves aux échanges dans certains pays d’Europe centrale. À titre d’exemple, l’étude régionale sur les infrastructures dans les Balkans (le rapport REBIS édité par la Commission en 2003) indiquait que plus de 70 % des routes dans la région balkanique avaient besoin d’être entièrement rénovées, et que dans le secteur ferroviaire, la plupart des lignes devaient être modernisées, seulement 10 % du réseau étant considéré comme viable.
- Le développement commercial : la proximité géographique et culturelle est une cause déterminante des flux commerciaux et des investissements. L’UE est de loin le partenaire commercial le plus important pour les pays d’Europe centrale et méridionale ; l’analyse des relations commerciales ainsi que les tarifs et les barrières non-tarifaires devraient se prolonger au commerce intra-régional, toujours insuffisamment développé.
À la fin des années 1990 et au début des années 2000, les interventions de la BEI dans les pays des Balkans se sont concentrées essentiellement sur les besoins prioritaires liés à la réhabilitation des infrastructures qui avaient souffert des dommages de la guerre. En particulier, plusieurs opérations de la BEI ces dernières années ont permis le financement de la mise à niveau des raccordements de transports et des réseaux d’électricité. Les efforts de la première phase des programmes de reconstruction doivent encore être poursuivis. Des prêts de la BEI ont été affectés à la modernisation et à l’évolution des équipements d’infrastructures en vue d’homogénéiser les standards de qualité, stimulant ainsi l’intégration des Balkans occidentaux dans un marché plus large.
La transition des pays balkaniques vers l’intégration européenne et la libéralisation économique se produit maintenant, après avoir contribué à rétablir la paix et la stabilité sociale dans la région.
Le succès, cependant, dépend en grande partie de la vitesse à laquelle la phase de rétablissement est mise en application, afin de produire des améliorations réelles dans la qualité de vie de la population.
À la BEI, nous considérons que pour atteindre un niveau d’emploi, de croissance et de cohésion sociale acceptable, il est essentiel de :
- Le développement des PME, qui représentent une source importante de création d’emplois. Des fonds de la BEI sont versés en ce sens par les banques locales ou les filiales des groupes de banques internationales opérant dans la région.
- La stimulation du capital humain (éducation, qualifications professionnelles et santé). Des investissements significatifs dans les secteurs de la santé et de l’éducation sont en effet instamment requis. Les insuffisances dans l’infrastructure scolaire, les lacunes dans les programmes de formation des professeurs et des directeurs, ainsi que l’utilisation insuffisante des nouvelles technologies sont des points essentiels à corriger. Les exemples récents des opérations de la BEI dans ce domaine sont importants dans les Balkans et se sont traduits par la réhabilitation de 20 hôpitaux régionaux, avec un prêt de 50 millions d’euros en 2003, et le financement de la construction de 9 écoles primaires et secondaires en Serbie avec un prêt de 25 millions d’euros en 2005.
Je voudrais observer que les progrès réalisés dans le processus d’élargissement sont tout à fait impressionnants. Cependant, les formidables défis qui nous attendent peuvent être relevés grâce à une coopération efficace entre la communauté et les gouvernements et autorités concernés.
La BEI se tient prête à augmenter son engagement et son appui aux gouvernements des régions voisines, en coopération avec la Commission européenne et son Agence européenne pour la reconstruction, la Banque mondiale, la Banque européenne pour la reconstruction et le développement, la Banque de développement du Conseil de l’Europe et d’autres donateurs intéressés d’institutions financières internationales et bilatérales.
En conclusion, je souhaite confirmer qu’au cours des années à venir, la Banque européenne d’investissement continuera à fournir un appui inconditionnel à la politique de l’Union européenne sur l’élargissement. Il se peut que la banque devienne un partenaire bien plus important qu’elle ne l’est aujourd’hui pour les pays de l’Europe de l’Est, centrale et méridionale en quête de réformes, d’investissements et de développement économique et social.