Vous êtes ici Le Journal du Parlement > E. S. Stroev, Président du Conseil de la Fédération de l’Assemblée Fédérale de la Fédération de Russie

La Chambre haute : un filtre supplémentaire

Le Parlement bicaméral russe a des racines profondes dans l’histoire de l’État russe. Le premier projet de Parlement russe, préparé par M. Spéransky à la demande du Tsar Alexandre Ier, envisageait une structure bicamérale. Ce même principe fut à la base du Parlement russe créé en 1906. Le principe du bicamérisme a persisté en U.R.S.S et a été repris par la Constitution de 1993. L’article 95 de la Loi fondamentale stipule : « L’Assemblée fédérale du Parlement de la Fédération de Russie se compose de deux Chambres : le Conseil de la Fédération et la Douma d’État. »

Actuellement, la Russie est dotée d’un système et d’institutions démocratiques authentiques, ayant été validés par des élections compétitives à deux reprises. Le primat de la Constitution et des normes du droit international, ainsi que les garanties des droits et des libertés fondamentales, sont des principes de l’État de droit consacrés par la Constitution.

Ce résultat n’aurait pas été possible sans un travail soutenu et intense du Parlement et de sa deuxième chambre, le Conseil de la Fédération. Au cours des dernières années, les deux chambres de l’Assemblée Fédérale ont débattu et adopté plus de 1500 mesures, incluant des actes fondamentaux tels que le Code Civil, la législation électorale, le Code Pénal, le Code fiscal, et la Loi sur le système de la justice, tous répondant aux exigences strictes requises par un État de droit.

Dans ce travail, la chambre haute a agi comme un filtre supplémentaire contre le populisme, le lobbying et les approches conjoncturelles. Le Conseil de la Fédération, composé des dirigeants des régions de Russie, joue également un rôle de conciliation des intérêts des 89 sujets de la Fédération de Russie. Un État de droit serait impensable sans un pouvoir judiciaire fort et indépendant, et il incombe selon la Constitution au Conseil de la Fédération de nommer les juges de la Cour Constitutionnelle, de la Cour Suprême et de la Cour Suprême d’arbitrage, ainsi que le Procureur Général. Les sénateurs russes abordent ces décisions avec une grande responsabilité, et bien que ces décisions ne soient pas prises à la légère, elles visent toujours le bien de la Russie.

Un autre aspect de l’activité du Conseil de la Fédération est son rôle de médiateur dans le dialogue quotidien entre les institutions du pouvoir. Le dialogue entre le législatif et l’exécutif n’est pas toujours simple, et l’expérience de nombreux pays le prouve. Pour un État fédéral comme la Russie, cela est compliqué par les problèmes de délimitation des compétences entre le centre fédéral et les sujets de la Fédération. L’esprit de la constitution et les attentes du peuple confèrent au Conseil de la Fédération un rôle de facteur de stabilité. Sans nuire au principe de la séparation des pouvoirs, nous cherchons à harmoniser les activités de toutes les administrations, à assurer une « Symphonie des pouvoirs », pour reprendre une expression née en Russie il y a 200 ans.

La défense de la consolidation de l’État de droit dans le monde contemporain est une partie intégrante de la mission globale de protection et de consolidation d’un monde fondé sur le droit. Ces dernières années, nous assistons à une révision rampante des normes du droit international universellement reconnues et à une tentative de retour au droit du plus fort. L’abus de la position dominante est l’antithèse du droit. Et, lorsque des États qui ont servi d’exemples de démocratie et de justice recourent à ce genre de pratiques, c’est l’idée même du droit qui est mise en cause. Le Conseil de la Fédération exprime une profonde inquiétude face à cette tendance et souhaite une coopération plus active des sénats du monde pour rétablir le prestige du droit international et pour le promouvoir. À cet effet, les organisations interparlementaires pourraient et devraient coopérer plus activement avec l’ONU, l’OSCE et d’autres organisations internationales.

Depuis 10 ans, le monde a changé plus que pendant le demi-siècle précédent. Nous assistons à une mondialisation de tous les aspects de la vie : économie, politique, finances, sciences. Les effets de cette tendance sont contradictoires. Pour le moment, la tendance vers un hégémonisme mondial unipolaire prévaut manifestement sur celle de mettre en valeur les possibilités potentielles de coopération au niveau planétaire. L’illusion de sécurité accrue est compromise par l’aggravation des conflits locaux et par l’offensive frontale du terrorisme.

La veille du nouveau millénaire, l’humanité a davantage de questions fatales que de réponses convaincantes. Et les Sénats du monde ont pour vocation de jouer un rôle actif et constructif dans la recherche de ces réponses.

L’expérience du Conseil de la Fédération et sa vision des tâches urgentes de l’actualité confirment l’importance d’établir un dialogue permanent et une interaction pratique des sénats du monde.