“L’expérience nous a enseigné combien coûte cher le fait de ne pas appartenir au cercle européen”
Notre localisation géographique est une constante ; elle ne changera pas avec notre entrée dans l’Union européenne. C’est pourquoi le contexte régional demeure crucial. Ce qui dépend de notre position, c’est l’intégration complète dans l’Union européenne. L’expérience récente de la Croatie et de la Macédoine en est la preuve. Le succès croate résulte de l’adoption et de la promotion de valeurs et d’objectifs européens. Nous nous en réjouissons, car nous bénéficions de leur stabilité démocratique et de leur développement en tant que voisins. Dans ce cadre, comme l’a suggéré le thème du Forum, la Croatie peut justement compter sur son rôle de « porte » de l’Europe pour le Sud-Est. Il s’est avéré que le degré d’institutionnalisation de nos relations avec l’UE est à la fois un indicateur et un repère très important pour les investisseurs. En outre, lorsqu’on évoque les avantages de l’intégration européenne pour la promotion de la démocratie, notamment dans les pays dont le développement est plus difficile, l’argument de la sécurité économique ne doit pas être négligé.
En effet, grâce à l’attention portée à la cohésion économique et sociale, l’intégration européenne a un impact prépondérant sur la consolidation, le développement et la sauvegarde de la démocratie.
Nous accueillons donc l’orientation de l’UE, qui se positionne comme le meilleur support du développement économique dans la région, comme indiqué par la Commission Européenne dans sa communication sur l’Ouest des Balkans du 27 janvier, ainsi que par l’agenda de la Présidence européenne autrichienne.
Nous sommes également conscients de l’importance de l’ouverture et de l’intégration d’un marché régional, puissant générateur de croissance économique, de compétitivité et d’emploi, et en général d’un meilleur niveau de vie pour nos citoyens. Ce sont là les principales préoccupations et objectifs de nos gouvernements. Les objectifs fixés par l’agenda de Lisbonne sont également pertinents pour les Balkans occidentaux. Dans nos réformes et orientations politiques nationales, nous devons les considérer de plus en plus comme des directives, ce qui est précisément le cas au Monténégro.
Tous les pays de la région ont accompli des progrès significatifs en termes de réforme, de macroéconomie et de stabilité politique, ainsi que dans leurs relations mutuelles et de coopération régionale. Je confirme que les gouvernements et les habitants de la région sont de plus en plus tournés vers un avenir européen. De nombreux progrès ont été réalisés vers l’intégration européenne, environ trois ans après le Sommet de Thessalonique : les négociations d’adhésion de la Croatie avec l’UE sont en cours, la Macédoine a obtenu le statut de candidat, l’Albanie, la Serbie et le Monténégro, ainsi que la Bosnie-Herzégovine, ont ouvert les négociations. Pour la paix et la transition démocratique, issues d’un difficile héritage politique, le rôle d’une perspective européenne a été réaffirmé. C’est particulièrement important à l’approche de l’achèvement démocratique des processus politiques de la région. Sur le seul problème en suspens de la sécurité, le Kosovo assure qu’à travers un dialogue réaliste, une solution démocratique stable et viable peut être trouvée.
Au Monténégro, la résolution des statuts est au cœur de la solution démocratique et du développement. C’est un énorme succès que le pays doit au soutien et au partenariat de l’UE. Je crois en un compromis pour une plus grande européanisation et, preuve de notre avancée démocratique significative et crédible, le référendum est devenu consensuel. Nous avons accepté un modèle unique, fixant à 55 % des voix le seuil minimal pour proclamer l’indépendance.
Ce référendum, qui s’est voulu juste et transparent, a conduit à l’établissement de l’indépendance du Monténégro. Ce sera bientôt un autre succès de la politique européenne dans la région, preuve que dans les Balkans aussi, nous avons maintenant, dans un esprit européen, une volonté de résoudre démocratiquement nos affaires.
Je rappellerais que le Monténégro a réussi à éviter les conflits dévastateurs dans l’ouest des Balkans dans les années 90 et à préserver et consolider une harmonie multi-ethnique. Sa démarche vers l’Europe démontre la force de « l’unité dans la diversité », qui est la devise de l’intégration européenne. Je pense fermement que l’épilogue démocratique et le succès du référendum monténégrin ont également un impact positif sur le processus de résolution du problème kosovar et sur une intégration plus rapide de la région à l’Union.
Cependant, lorsque le chapitre des statuts sera clos, nous veillerons à ce que les acteurs politiques puissent se concentrer sur les réformes nécessaires de l’agenda économique et social, car c’est cette voie qui nous conduira vers l’Europe. Nous ne pouvons pas nous permettre des arrangements étatiques dysfonctionnels et des ajournements qui entraveraient notre intégration. Ce point est extrêmement important, non seulement pendant cette phase vers l’Europe, mais surtout pour notre crédibilité et notre position en tant que futur État membre.
Sur cette base, nous continuerons à consolider et développer nos liens avec la Serbie et les autres pays des Balkans. Nous partageons un héritage commun et surtout le même objectif européen. Soucieux de maintenir de bonnes relations de voisinage et de coopérer dans le respect total des droits de l’homme et des minorités, nous remplissons toutes les conditions préalables pour rejoindre l’Union. Finalement, j’aimerais réitérer l’importance, la certitude et la crédibilité de cette perspective pour les pays des Balkans. L’expérience nous a appris combien il est coûteux de ne pas appartenir au cercle européen. Cela nous oblige bien sûr à remplir les critères d’adhésion.
par Milo Đukanović